Taxis vs Véhicules de Tourisme avec Chauffeurs : ce qu’il faut savoir
13 février 2014
Coup de colère chez les taxis : le 10 février dernier, une manifestation a paralysé la capitale au grand dam des automobilistes. Partis de bon matin des grands aéroports parisiens pour se réunir dans le 7ème arrondissement, entre 5 000 et 6 000 taxis se sont mobilisés pour la deuxième fois en 1 mois pour tenter de bloquer plusieurs entrées de Paris avec succès (plus de 600 taxis étaient quant à eux réunis à Marseille). La colère monte et ils étaient deux fois plus nombreux que la première fois. Les forces de l’ordre ont même dû intervenir et le ton est monté avec les gendarmes. Il fallait plus de quatre heures pour faire 15 km et on comptait 260 km de bouchons au total en Ile-de-France. Toute la journée, les opérations escargots se sont multipliées sur les autoroutes, le périphérique parisien et dans Paris. Des concertations entre les représentants syndicaux et le gouvernement sont en cours, mais aucune décision n’étant prise, les opérations de blocage continuent ponctuellement sur la capitale et les syndicats ont appelé à une grève nationale reconductible.
Cette grève se justifie par l’exaspération des taxis qui se disent excédés par la concurrence déloyale des VTC (Véhicules de Tourisme avec Chauffeur) et qui dénoncent une perte de chiffre d’affaires. Un décret visant à protéger les taxis de la concurrence et imposant aux VTC un délai d’attente de 15 minutes avant de pouvoir prendre un client, a été suspendu par le Conseil d’Etat il y a quelques jours dans l’attente d’être réexaminé dans quelques mois. Les taxis réclament des conditions de travail équitables, l’instauration d’une course minimum de 60 euros pour les VTC, un délai de réservation de 30 minutes sur Paris et d’une heure pour les aéroports. La cohabitation entre taxis et VTC est donc devenue de plus en plus difficile voire conflictuelle en France.
Devenir taxi coûte cher ?
La licence, c’est l’objet principal du mécontentement des taxis : il faut compter environ 230 000 euros pour une plaque à Paris et sa région, voire plus (comme à Nice). Elles sont normalement gratuites, mais les préfectures et mairies qui les distribuent le font au compte goutte (15 à 20 ans d’attente à Paris). Une rareté qui a engendré un marché : les chauffeurs se les revendent et les enchères grimpent.
Pour les VTC une carte professionnelle est suffisante pour exercer et elle coûte environ 100 euros.
Des charges plus lourdes pour les taxis?
Après avoir acheté sa licence, un chauffeur de taxi doit aussi régler un droit d’enregistrement qui coute environ 6 000 euros. Concernant les charges, 50% sont reversées à l’Etat (sur 20 euros de course, 10 euros sont directement reversés). Entre les charges sociales, les impôts, et les nombreuses heures de travail par jour, les taxis encaissent mal le fait que les VTC eux, souvent auto-entrepreneurs, n’ont pas ou très peu de charges à payer.
Un service différent et des contraintes
Les taxis se distinguent par une signalétique lumineuse, peuvent prendre des passagers sans réservation dans la rue, stationner sur la voie publique et emprunter les voies réservées aux taxis. Le prix de la course est non forfaitaire et très réglementé pour les taxis : il est fixé en début d’année par le gouvernement et comprend la prise en charge ajoutée au tarif kilométrique ou horaire (et le règlement en espèces est préféré par les chauffeurs à la carte bancaire). Mais il reste compétitif car moins cher que les VTC. Les touristes et les habitants des grandes villes se plaignent toute fois des frais d’acheminement et de la mauvaise humeur de certains chauffeurs.
Les VTC n’ont pas de signalétique lumineuse (et ne sont donc pas forcément identifiables) et ont des restrictions dûes à leur activité : ils n’ont pas le droit de marauder (c’est-à-dire « prendre à la volée » des passagers dans la rue n’ayant pas réservé), ne peuvent pas stationner sur la voie publique, doivent circuler sur les mêmes voies que les autres automobilistes (et donc subissent potentiellement les bouchons). Ils fixent librement leurs tarifs (facture au forfait – pratique en journée, surtout s’il y a embouteillage – ou au kilométrage, et pas de frais d’acheminement) et il est possible de payer par virement. La réservation est obligatoire (par centrales d’appels ou applications mobiles) et les VTC sont environ 20% plus chers car proposant plus de confort : voitures haut de gamme voire électriques, un chauffeur serviable, bouteilles d’eau, friandises, prises pour recharger le téléphone voire écouter sa musique dans l’habitacle, journaux et magazines, ou encore tablettes tactiles. Les clients disent apprécier la propreté des véhicules, la courtoisie des chauffeurs, la transparence des tarifs, et le sentiment de sécurité.
Aujourd’hui on compte 55 000 taxis pour 12 400 VTC en France, et dans les grandes villes il y aussi la concurrence des motos taxis. Il semble y avoir un manque d’offre et c’est particulièrement vrai à Paris. Comme nous l’explique lemonde.fr, dans la capitale on compte 3 taxis et VTC pour 1 000 habitants, alors qu’à New York on compte environ 8 véhicules. La demande serait donc suffisante pour tous.
A Londres, VTC et taxis cohabitent depuis plus de 15 ans mais à certaines conditions
Dans la capitale anglaise, on compte trois fois plus de taxis et VTC qu’à Paris et ces deux systèmes coexistent depuis longtemps, car les VTC anglais appelés « mini cab » ont été légalisés il y a 16 ans. Leur développement n’a pas causé la ruine des taxis traditionnels : ces derniers ont résisté à l’arrivée des mini cab.
Au début, ils disent avoir réagi comme les taxis français actuellement, mais avoir rapidement compris que les règles sont différentes. Ils ont l’impression d’être plus libres : ils peuvent prendre des clients dans la rue et les mini cabs ne peuvent être utilisés que par réservation. Dans des centrales d’appels, le prix est annoncé par l’opérateur et ne varie pas quelque soit la durée du trajet, un avantage dans une ville connue pour ses embouteillages.
C’est une saine compétition qui dure depuis longtemps, au bénéfice des clients qui ont plus de choix. Par conséquent, il est plus facile à Londres qu’à Paris d’obtenir un véhicule avec chauffeur ou un taxi.
Mais il est important de souligner que les deux services ont une licence à payer ( plus chère pour les VTC) et les conducteurs de taxis doivent passer un examen (payant) sur leurs connaissances des rues de Londres : des disparités qui n’engendrent pas de conflits. Dans l’ensemble, les deux services ont de bons rapports et il y a assez de travail pour tous. Enfin dans 4 ans, les taxis vont petit à petit tous se moderniser, et devenir électriques. Un exemple à suivre ?